Numéro 19

Les chefs

144 pages pour se glisser devant, derrière et tout autour des fourneaux.

Les chefs
20 €
Mise en bouche

La cuisine, de plus en plus, c’est comme la vengeance : ça se mange froid, sur un écran. À la télé, le succès des émissions culinaires ne se dément pas : c’est d’abord par elles que les cuisiniers, en quinze ans, sont devenus des célébrités. Sur les réseaux sociaux, les chefs et leurs créations sont partout, en photo et en vidéo, entre deux images de vos vacances ou sur le profil, soigné et rémunérateur, d’influenceurs food qui ont supplanté l’historique critique gastronomique dans la presse papier (on vous en parle).

C’est pour donner un peu plus de chair et de profondeur à celles et ceux qui la font que Sphères a décidé de consacrer son 19ème numéro à cette communauté de travailleurs acharnés, fatigués, cultivés, un peu magiciens, bons vivants, curieux et méticuleux : les chefs. Dans les pages que vous allez lire, cela passe d’abord par deux rencontres inédites. La première entre la pionnière Olympe Versini et la doublement étoilée Stéphanie Le Quellec, deux cheffes d’exception qui comparent leurs époques, leurs goûts, leurs parcours sous pression. La seconde, aux Baux-de-Provence (Bouches-du-Rhône), entre le chef triplement étoilé Glenn Viel et le plongeur sous-marin Laurent Ballesta. En quels honneurs ? Entre autres ceux de la mer, de la curiosité, de la préservation de la nature. 

Mais la cuisine, dans ce numéro, va au-delà des étoiles. Elle jongle entre plaisir et performance, chez les chefs qui préparent des plats pour des coureurs du Tour de France, ou bien pour des sumos. Elle se redécouvre, chez les cuistots anglais qui mettent à jour une tradition locale à l’encontre d’un cliché bien ancré. Elle a son histoire – glorieuse, pour la famille Pic – et ses parcours insolites, comme celui du chef libanais Tarek Alameddine. Elle se remet en question, avec Manon Fleury et l’association Bondir.e.  Au Japon, elle expose sa plastique parfaite. Vous comprendrez.

Les pages qui suivent sont une invitation : non pas à table, mais dans la cuisine des chefs, où se racontent leurs grandes histoires. Pour déguster, c’est à vous de jouer. 

Stéphanie Le Quellec et Olympe Versini : Interstellaire

Elles ne se sont rencontrées qu’il y a quelques semaines, mais les voilà intimes : Versini la précurseure vient de déjeuner chez Le Quellec la relève, au creux de cet écrin vert sombre et bois clair qui s’intitule La Scène, deux étoiles sis avenue Matignon.

La première, 74 ans, plus jeune cheffe étoilée (31 ans à l’époque), cuisinière star forte en gueule dans les années 1970 et 1980, est aujourd’hui relativement inconnue du grand public – absurdité que le beau livre Olympe, une cuisinière libre, écrit par Anne Etorre et publié en octobre 2024 chez Hachette, entend corriger. La seconde, 43 ans, jury de Top Chef après avoir remporté la saison 2, en 2011, gère donc un deux étoiles (qu’elle avait gagnées auparavant au Prince de Galles) ainsi qu’un bistronomique, un restaurant de poissons et un traiteur.

Les deux pointures discutent de leurs parcours respectifs, nés de motivations opposées mais qui ont en partage les louanges des critiques et la pression qui en découle, le sexisme derrière les fourneaux, la médiatisation à degrés divers ou encore la séduction à travers l’assiette.

God save the Rosbif

On ne mangerait nulle part ailleurs plus mal qu’en Angleterre. Derrière ce cliché persistant se cachent quelques vérités sur la cuisine anglaise, à commencer par la disparition des cultures culinaires locales. Subsiste cependant une tradition importante, mise à jour par de nombreux chefs anglais : le rôti du dimanche, ou « Sunday roast » en VO. Illustration à Alfriston, un petit village du Sussex.

Glenn Viel et Laurent Ballesta : Voyage au bout de la mer

Le service de midi débute dans à peine plus d’une heure. Pourtant, dans l’immense cuisine de L’Oustau de Baumanière, restaurant trois étoiles situé aux Baux-de-Provence (Bouches-du-Rhône), la trentaine de cuisiniers s’affaire dans une agitation maîtrisée. Pas un mot ne vole plus haut que l’autre, seule une musique entraînante rythme l’ambiance du lieu. Au centre, le chef Glenn Viel, lunettes sur le nez et cheveux noués en catogan, discute avec ses équipes.

Exceptionnellement, le Versaillais de 45 ans, connu pour son franc-parler dans l’émission Top Chef dont il est membre du jury depuis 2022, n’assistera pas aux premiers coups de feu du service. Amoureux de l’océan dont il connaît les effluves et les saveurs par ses origines bretonnes, il ne pouvait rater l’occasion de recevoir un convive de marque, adepte comme lui des mystères que recèlent les abysses : Laurent Ballesta. Le plongeur et photographe sous-marin de 50 ans, originaire des plages palavasiennes proches de Montpellier, incarne tout ce que Glenn Viel admire : un amour immodéré pour la découverte, un besoin irrépressible de liberté et des histoires à faire taire même un Breton.

Installés dans le jardin de l’hôtel Baumanière, entourés d’imposantes falaises de granite, les deux hommes discutent longuement. Ensemble, ils reviennent sur ce qui les unit : la nourriture, bien sûr, mais aussi le commandant Cousteau, la préservation de l’environnement, le pouvoir des images ou encore leur goût infini pour la curiosité.

Fake Food

D’impérissables pancakes, une assiette de sushis sans saveur, une montagne de burgers sans odeur : au Japon, des plats en plastique ornent fréquemment les devantures des restaurants. Le photographe Marco Argüello est remonté à la source de leur production, dans le centre de l’archipel : un artisanat local extrêmement précis, vieux de près de cent ans.

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